Café Photo avec Alain Trouilly

Né en Lorraine en 1952, il habite actuellement en région parisienne.
Il a effectué ses débuts photographiques en noir et blanc argentique, et, au passage au numérique, il a continué à travailler en noir et blanc.
« Longtemps, mes sujets étaient dans la rue. Simples instants de vie, moments d'émotion, jeux d'ombre et de lumière, reflets éphémères, images attrapées au hasard de mes vagabondages et posées sur le papier, souvent en noir et blanc. »

Après avoir pratiqué la photo de rue, il fait sa première expérience de photo de reportage à Rome, en octobre 2014, dans une manifestation rassemblant un million de personnes. Ce sera sa première « série ».
Alain Trouilly ne travaille désormais plus que sur des séries. Il les réalise en s’imposant des contraintes : focale fixe de 50 mm, critère de profondeur de champ, noir et blanc …
L’ordre des photos dans une série n’est pas anodin : importance de la première photo et de la dernière, rythme dans la succession des photos, etc.

C’est à Chabeuil qu’il expose pour la première fois, une expérience enrichissante par le contact avec le public qui permet de couper le lien du photographe avec sa production. Le regard de l’autre.

Il a été très attiré et très influencé par le travail et le style de Ralph Gibson ainsi que par Jeanloup Sieff (en particulier son livre « La terre se souvient »).

Alain Trouilly explique que le noir et blanc est une bonne façon pour rompre avec le réel.
Il partage avec nous son cheminement empreint de réflexion et d’émotion.

Il nous présente plusieurs de ses séries. Sur écran, d’abord, puis en tirages papier (tirages qu’il effectue lui-même).


Chaque série est introduite par un texte :

Visages pour un NON
 Le 25 octobre 2014, un million de personnes ont arpenté les rues de Rome pour dire NON à la réforme du code du travail. Au cœur du défilé, j'ai voulu montrer les multiples visages du manifestant ordinaire, ses expressions, ses émotions. Celui qui est entré dans mon objectif se révèle tour à tour engagé, déterminé, pénétré, révolté, hostile, frondeur, inquiet, bon enfant, digne.
C'est un autre et pourtant c'est le même. Il dit NON

Matière noire 
16 heures,
Soleil devant.
L'œil se plisse, brûlé par la lumière,
Et l'ombre apparait,
Dévorant ce qui m'était familier.
Ne reste que la matière.
Noire.

Valmont
On y allait, le temps s'arrêtait.
On y allait pour les enfants,
On y allait, on restait enfant.
Ils avaient un cœur gros comme ça,
Mais Papi est parti trop tôt,
Mais Mamie nous a quittés hier.
Dans la maison, rien n'a changé,
Sauf le cœur qui n'y est plus.

Le temps est passé,
Nous n'allons plus à Valmont.
Des images reviennent,
Surgies d'une brume toujours plus épaisse.
Alors on ferme les yeux,
Et on y pense très fort,
A comment c'était,
Et au cœur,
Au cœur gros comme ça.

Boys, in memoriam 
Ils sont cent, mille, dix-mille,
Qui reposent sous une stèle de marbre blanc.
Ils sont Andrew, David, Lawrence,
Qui ont donné leur vie pour notre liberté.
Sur eux le soleil s'est éteint,
Sur eux la terre de France s'est refermée,
Nous laissant une dette,
Éternelle.

Migrant
Je suis
hier
aujourd’hui
demain
un jour peut-être
migrant

Pour cette dernière série, il fait référence au travail de Gilbert Garcin.

Ces séries (et d’autres), sont publiées sur son site : www.alaintrouilly.fr/photos


C’était une très belle soirée, merci à Alain Trouilly.

Compte-rendu : Jacques Chareyre